Pour en finir avec la “schizophobie”, par Vincent Girard et Claude Lefebvre

La tribune ci-dessous a été publiée dans le journal Le Monde en août 2008 :

En décembre 2004 à l’hôpital psychiatrique de Pau, deux infirmières étaient assassinées de façon spectaculaire par un ancien patient. Cet événement, hautement médiatisé, fit réagir le gouvernement, qui commanda deux rapports et lança, en février 2005, un nouveau plan santé mentale. Le budget 2005-2008 alla donc pour une grande partie dans la construction de “murs”. Un non-sens puisque 68 % du suivi psychiatrique est réalisé hors de l’hôpital. Paradoxalement, la grande majorité du personnel des services de psychiatrie publics travaille au sein d’un hôpital, et non pas dans la cité, où vivent pourtant les patients.

Les faits divers et la réaction de certains politiques renforcent les stéréotypes existants dans la population, qui lient meurtre et maladie mentale. Ainsi, une récente enquête du centre collaborateur OMS de Lille, réalisée sur plus de 40 000 Français, montre les amalgames forts qui existent dans les représentations sociales des Français entre meurtre, inceste, violence et folie et maladie mentale. Avec toutes les conséquences que cela a sur l’image de la psychiatrie. Des amalgames qu’il faut dénoncer car, en réalité, environ 95 % des meurtres sont commis par des personnes n’ayant aucune pathologie mentale !
En 2005, le rapport “Santé, justice et dangerosités”, proposait comme mesure nouvelle l’enfermement des détenus présentant des troubles de la personnalité et reconnus comme “encore dangereux”, une fois leur peine de prison réalisée, dans des “centres fermés de protection sociale”, de façon renouvelable tous les ans, et donc possiblement jusqu’à la mort. Cette proposition va bientôt être appliquée par le gouvernement.
Un rapport publié en mars 2005 sous la direction de l’anthropologue Anne Lovell soulignait pourtant : “Le risque attribuable aux personnes malades mentales (…) est faible, les taux estimés sont encore bien moindres si l’on décompte les troubles liés à l’alcool.
Les données scientifiques mettent en évidence la vulnérabilité d’une personne atteinte de schizophrénie, bien plus souvent victime d’agressions, de vols et de viols qu’une personne non malade. La prévalence des crimes violents envers les patients psychiatriques est 11,8 fois plus importante qu’en population générale. La prévalence des vols sur personnes est quant à elle 140 fois plus élevée. 40 % des personnes sans abri présentant une schizophrénie se sont fait agresser au cours des six derniers mois. Le risque pour une femme sans abri atteinte de schizophrénie d’être victime d’agression physique et de viol est tellement important que les chercheurs parlent d’expérience normative.
Ces violences dont sont victimes les sans-abri présentant une schizophrénie sont liées à leur grande vulnérabilité et à la stigmatisation de leur pathologie. Cette stigmatisation, entretenue par les médias, favorise le repli, l’isolement, le sentiment d’infériorité et conséquemment les suicides, très nombreux. La première des urgences en France est de développer le travail d’équipes mobiles de psychiatrie et de donner un logement et des possibilités de réinsertion aux sans-abri.
Il est significatif que la question de la maladie mentale soit abordée par la presse et les politiques à l’occasion d’un meurtre. La réaction du sénateur Demuynck, qui propose des mesures vigoureuses de placement, rappelle celle de M. Douste-Blazy, qui proposait plus de lits d’hospitalisation. Il existe aujourd’hui entre 300 000 et 500 000 personnes atteintes de schizophrénie en France qui n’ont jamais commis de meurtre. Elles ont des droits, notamment celui d’être protégées par le gouvernement des discriminations et des violences physiques et psychologiques dont elles sont victimes au quotidien.
Aujourd’hui le problème principal rencontré par ces personnes est celui de la stigmatisation et de l’exclusion. Elles demandent à être considérées comme tous les autres citoyens dans la cité. Nombre de personnes diagnostiquées avec une schizophrénie disposent d’un appartement, travaillent, payent des impôts, ont des activités sociales riches, fondent même des familles.
L’amalgame fait par le grand public, les médias et les politiques entre maladie mentale et violence doit cesser, car il est une violence de plus faite aux personnes malades. Cette idée reçue génère des peurs, des réactions de rejet qui entraînent de graves conséquences sur leur santé et sur leur vie. Cette “schizophobie”, comme la xénophobie et l’homophobie, doit être combattue. Une nouvelle loi de santé publique doit être votée, une loi qui aurait pour objectif de protéger les personnes concernées par la maladie mentale. Ce sont elles les premières victimes.

Vincent Girard, psychiatre
Claude Lefebvre, photographe

Article paru dans l’édition du Monde du 17.08.08.

Documentaire sur la souffrance mentale en Algérie : thérapies algériennes

Ci-dessous un documentaire algérien réalisé par Malek Bensmaïl, lui-même fils de psychiatre, sur deux structures :
– le service psychiatrique du CHU de Constantine,
– et l’établissement hospitalier spécialisé, autre structure d’accueil de la ville.

Les psychiatres ont ainsi identifié à partir de quelles spécificités de la société algérienne se développent souffrance psychique et maladie mentale : à savoir, les séquelles de la guerre de libération, le rapport à la langue -français, arabe ou berbère-, donc à l’identité, le rapport à la religion et à l’intégrisme, les bouleversements socioculturels, le traumatisme de la violence et de la crise politique que subit le pays depuis des années…

http://www.telleestmatele.com/article-6983885.html

Il montre bien quels types de pathologies peuvent avoir les Algériens, pays différent de la France (on croit souvent que la schizophrénie est uniquement l’apanage des pays développés). La religion musulmane est très présente et influe sur les délires (par exemple un malade récite le Coran et veut la paix sur terre dans le documentaire). Autre exemple, beaucoup de schizophrènes se croient possédés par des Jinns, génies bénéfiques ou maléfiques présents dans la tradition musulmane.
Le terrorisme revient aussi souvent car l’Algérie a été frappée par ce fléau dans les années 90.

Malheureusement, au final, les psychiatres ne peuvent pas trop parler de maladies car la norme est que les possessions par les Jinns sont réelles (la norme de la société est de croire en Allah, les médecins ne peuvent critiquer les manifestations irrationnelles de la religion). Les psychiatres soignent juste et distribuent des ordonnances. C’est difficile pour un schizophrène dans un pays musulman de reconnaître que ses symptômes sont une maladie et non un Jinn qui lui parle.

N’hésitez pas à le regarder et à donner votre avis en commentaire de ce billet.

Autre recension de ce documentaire :
http://malek.bensmail.free.fr/pdf/alienation-television.pdf

émission de télévision sur la psychiatrie et les personnalitées borderlines

L’émission de télévision suisse « Temps présent » était consacrée à 2 services d’hôpitaux de Neuchâtel. Un de psychiatrie avec des patients schizophrènes et un avec des patients à la personnalité borderline*.

L’émission est visionnable en ligne : lien vers le site de l’émission sur le site de la TSR (Télévision Suisse Romande)

Texte sur la page de l’émission :

Hôpital Psy à coeur ouvert

Pour la première fois en Suisse, une équipe de télévision a filmé le quotidien d’un hôpital psychiatrique. Ces établissements font encore l’objet de phantasmes et de tabous. Les malades subissent encore une stigmatisation de la société. Pourtant, la majorité d’entre eux réintègrent leur vie normale après un passage à vide.

*article de Wikipedia sur les personnalitées borderlines

émission de radio sur l’histoire de la folie

L’émission de radio de Patrice Gelinet « 2000 ans d’histoire » du 3 septembre 2009 était consacrée à l’histoire de la folie.

Lien pour télécharger l’émission (clic droit -> « enregistrer sous ») ou l’écouter en streaming [format mp3, 27,4 Mo]

invité : Claude Quétel, historien spécialiste de l’histoire de l’enfermement et de la psychiatrie, directeur de recherche honoraire au CNRS.

Texte de présentation de l’émission :

Aussi loin que l’on remonte dans l’histoire, et même bien avant qu’on leur donne un nom, il y a toujours eu des fous. Et leur folie n’a pas attendu Michel Foucault pour avoir une histoire. Ce qui a changé, ce n’est pas la folie mais son diagnostic, son traitement et le regard qu’on porte sur elle. S’agit-il d’une maladie du corps ou de l’âme ? D’une défaillance physique ou psychique ? D’un châtiment de Dieu ou de l’œuvre du diable ? Est elle où n’est elle pas « le sublime de l’intelligence » comme l’écrivait Edgar Poe ? Depuis toujours, les hommes se sont posé ces questions et, selon les réponses, ont traité la folie de différentes manières. Par la médecine, l’enfermement dans les hôpitaux, des maisons de force ou des asiles où, comme il y a 2000 ans, en espérant un miracle.

Livres

Claude Quétel, Histoire de la folie : De l’Antiquité à nos jours
éditions Tallandier
paru en 2009

Claude Quétel et Jacques Postel, Nouvelle histoire de la psychiatrie
éditions Dunod

Page de l’émission :

http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/2000ansdhistoire/index.php?id=82670

Critique du livre de Claude Quétel :


Histoire de la folie de l'Antiquité à nos jours par universcienceTV

émission de radio sur le cerveau

L’émission « Science publique » de Michel Alberganti sur France Culture était consacrée ce vendredi 5 février 2010 au sujet « Comment notre cerveau évolue-t-il avec l’âge ? »

Lien pour télécharger l’émission (clic droit -> « enregistrer sous ») ou l’écouter en streaming [format mp3, 53 Mo]

L’émission n’était consacrée qu’à la marge à la schizophrénie. Elle rappelait les liens entre consommation de cannabis ou de LSD et apparition d’hallucinations et entrée dans la schizophrénie.

Page de l’émission sur le site de France Culture :

http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/science_publique/fiche.php?diffusion_id=80776

émission de télévision sur le cerveau

L’émission « C dans l’air » d’Yves Calvi sur France 5 était consacré hier vendredi 5 février 2010 au cerveau et à la mémoire. Elle n’aborde certes pas la schizophrénie mais n’en est pas moins intéressante. Le prétexte de l’émission et point de départ du talk-show est l’annonce d’une possible découverte par le professeur Beaulieu contre la maladie d’Alzheimer.

émission de Public Sénat sur les UMD et les appartements thérapeutiques

Une émission « enjeux d’avenir de la chaîne Public Sénat était consacrée en 2009 à « l’enfermement psychiatrique ».

L’émission est revisionnable en Vidéo à la Demande sur
http://www.publicsenat.fr/vod/enjeux-d-avenir/l-enfermement-psychiatrique/jean-louis-senon,jean-luc-roelandt,/60877

1/3

L'enfermement psychiatrique 1/3 par Petite-Facetieuse

2/3

L'enfermement psychiatrique 2/3 par Petite-Facetieuse

3/3

L'enfermement psychiatrique 3/3 par Petite-Facetieuse

Elle abordait entre autre la question des Unités pour Malades Difficiles (en consacrant un reportage à l’UMD Sarreguemines en Moselle) et celle des appartements thérapeutiques (en consacrant un reportage aux appartements thérapeutiques en Italie où ils sont plus développés).

Etaient interviewés aussi le psychiatre et criminologue Jean-Louis Senon et le psychiatre Jean-Luc Roelandt.

Le psychiatre et criminologue Jean-Louis Senon avait un point de vue intéressant sur les mesures que voulait mettre en place le président de la République française fin 2008 (après le meurtre à Grenoble d’un étudiant par un schizophrène échappé d’un hôpital psychiatrique) : le bracelet électronique. Il disait que cette mesure est absurde et contre-productive. Les malades étant parfois paranoïaque, la pose d’un bracelet électronique ne fera qu’alimenter leur délire et ne les aidera pas à se stabiliser.

sujet sur un schizophrène dans le JT de 20 heures de France 2 du 03 février 2010

Un sujet du JT de 20 heures de France 2 du mercredi 03 février 2010 était consacré à schizophrène.

Il est visionnable en ligne sur :
http://jt.france2.fr/player/20h/index-fr.php?jt=20100203
(à 10 minutes du début)

émission de radio sur l’UMD (Unité pour Malades Difficiles) de Villejuif

La courte émission de radio « reporters » à 7h15 dans la matinale de France Inter était consacrée ce matin à « Les malades mentaux sont-ils dangereux ? ».

Lien pour télécharger l’émission (clic droit -> « enregistrer sous ») ou l’écouter en streaming [format mp3, 4,8 Mo]

Dommage que la journaliste de France Inter Danielle Messager n’ait pas dit dans son reportage que s’il y a bien 400 à 450 schizophrènes au total dans les 5 UMD françaises, ils ne représentent qu’une infime partie des 650 000 schizophrènes en France.

Elle donnait d’autres chiffres :
– la durée de séjour moyenne en UMD est de 1 an
– un psychiatre ou infirmier interrogé disait que les non-lieu pour irresponsabilité pénale psychiatrique ne représentaient que 0,4 % des affaires (criminelles ? pénale ?).

Texte sur la page de l’émission :

jeudi 4 février 2010

Les malades mentaux sont-ils dangereux?

C’est la question que l’opinion publique se pose régulièrement après un fait divers traumatisant dans lequel un malade sorti d’un hôpital psychiatrique se trouve impliqué. Aujourd’hui , hors contexte de faits divers, on va se rendre dans une UMD: unité pour malades difficiles.Il existe 5 UMD en France. Je vous emmène dans l’unité la plus ancienne, puisqu’elle date de 1910. Elle est rénovée heureusement! Elle se trouve dans l’enceinte de l’hôpital psychiatrique Paul Guiraud de Villejuif. 7O% des patients viennent d’un service psychiatrique qui ne s’en sortait pas avec eux, c’était l’échec total ; les autres ont commis ce qu’on appelle un acte médico-légal….C’est le Dr Bernard Lachaux, psychiatre médecin-chef qui nous introduit dans l’unité.On n’est pas en prison, mais ça y ressemble un peu quand même, de l’extérieur !

Interview

L’itinéraire des 69 malades passe par 3 pavillons. Celui d’entrée est le plus « délicat ». Ensuite, il y a l’intermédiaire et puis enfin, celui de la sortie. On arrive au pavillon d’entrée… Les malades sont dans leur chambre ; c’est le repos de l’après-midi.

Interview

Alors qu’ on parle « sécurité » indispensable…c’est le soin , encore et toujours le soin, qui est mis en avant: médicaments, psychothérapies, activités… Mais qu’est-ce qui fait que ce qui a échoué en HP classique va réussir ici ?

Interview

Des systèmes de soins intensifs parce qu’ils s’adressent à des malades en danger ou à des malades dangereux ? Le grand mot est lâché, à l’occasion rare mais toujours très exploitée d’un fait divers dramatique. L’association est vite faite entre dangers et malades mentaux.

Interview

Pour autant, peut-on, comme le souhaiterait l’opinion, prévenir tous les risques et apporter une réponse politique à un problème de santé ?InterviewLa durée de séjour en unité pour malades difficiles est en moyenne de 1 an. La plupart des malades n’y vient qu’une fois avant de regagner un service psychiatrique classique.
____________________________________________________________
Un reportage de Danielle Messager.

sujet sur les UMD dans le JT de 20 heures de France 2 du 31 janvier 2010

Un sujet du JT de 20 heures de France 2 du dimanche 31 janvier 2010 était consacré aux UMD (Unités pour malades difficiles).
Il est visionnable en ligne sur :

http://jt.france2.fr/player/20h/index-fr.php?jt=20100131
(à 12 minutes 25)

C’est l’UMD de Sarreguemines en Moselle qui a accueilli l’équipe de tournage des journalistes de France 2.

Plus d’informations sur l’article Wikipedia sur les UMD (Unités pour malades difficiles).